Par Jean-François Fontaine, B. ing. M.Sc.A. Profit Maker & Speaker chez Vision Profit
Bien des pratiques d’affaires sont considérées comme acquises et jamais remises en question, et s’il y a une chose qui revient tout le temps lorsque je discute avec mes clients, c’est qu’implicitement on prend pour acquis que les coûts qui sont rattachés à une soumission sont variables et qu’ils disparaîtront si la soumission n’est pas gagnée.
La réalité est tout autre et lorsque je fais remarquer que mis à part le matériel associé, la plupart des coûts ne disparaîtront pas en même temps que la perte de la commande potentielle, mes interlocuteurs sont d’accord!
Et pourtant, les systèmes d’estimation restent les mêmes et les décisions de prix sont toujours basées sur une politique de profit minimum à respecter, sinon, on refuse d’accepter de vendre à un prix inférieur.
Mais il y a plus, car une décision de prix n’est pas seulement le respect d’une politique de profit minimum.
Tout est question de « timing » au moment où ce type de décisions doit-être pris. Il y donc lieu de se poser trois questions importantes :
- Quel est l’impact de cette commande sur le taux d’utilisation de mes principaux équipements?
Dans la mesure où la réalisation de la commande peut être exécutée avec mes équipements sans ajout de personnel ou de temps supplémentaire, quel est le véritable coût à réaliser celle-ci?
À moins d’ajouter du personnel et/ou de créer un quart de travail, gagner ou non la soumission n’a aucun impact sur les dépenses d’opération de l’entreprise.
Bien entendu, le matériel qui doit-être utilisé sera attribué à la commande si et seulement si la soumission est gagnée.
- Que vais-je faire de la capacité disponible si je ne gagne pas cette soumission?
Accepter de vendre ou non aux prix demandés par le marché n’est pas seulement question de respecter la politique de profit de l’entreprise, c’est aussi se demander quelles sont les autres soumissions en cours qui peuvent remplacer celle-ci si je ne gagne pas?
Tout est question d’opportunité au moment où la décision est prise car si nous n’avons pas d’autres commandes permettant de « compenser » pour la perte de cette soumission, peut-être serait-il mieux d’être ouvert à négocier un prix plus compétitif?
D’un autre côté, si le carnet de commande est bien garni et que la perte de la soumission n’a aucun impact sur la rentabilité du mois, alors oui nous avons le luxe de tenir à nos prix.
Dans quelle position votre organisation se situe-t-elle?
- Quel est le véritable impact « cash flow » de ne pas réaliser cette commande?
L’autre élément fondamental à considérer est l’impact des flux monétaires générés par la vente de cette commande. Dans la mesure où les coûts de main d’œuvre restent les mêmes, perdre la soumission engendre un coût d’opportunité correspondant aux contributions (prix de ventes – matériel) qui ne seront pas obtenues parce que la vente n’a pas eu lieu.
Perdre une soumission n’est pas à coût nul, la perte engendre un coût d’opportunité qui impacte négativement les profits!
Donc perdre une soumission ne fait pas disparaître les coûts d’opération associés, mais en plus, il nous en coûte la contribution qui aurait été générée si nous avions obtenu la commande.
Il y donc lieu de se poser la question suivantes :
Ai-je les moyens de me priver des contributions générées aux prix que les clients sont prêts à payer?
Toutes les décisions de prix doivent-être organisées en fonction des objectifs de rentabilité de l’organisation. Elle doivent-être orchestrées de manière à assurer l’atteinte de la rentabilité mensuelle ou trimestrielle sans attendre la production des états financiers plusieurs semaines après la fermeture de la période.
Quand on y pense, nous connaissons tous les coûts récurrents que notre entreprise doit supporter pour avoir pignons sur rue, et ces coûts incluent aussi tous les coûts de main d’œuvre puisqu’il est de plus en plus difficile de trouver de la main d’œuvre qualifiée. Celles-ci se raréfient et lorsque notre équipe est performante, la dernière chose à faire est de l’amputer parce que les volumes de ventes sont en baisses. Bien au contraire,
Augmenter nos ventes à des prix compétitifs permet d’augmenter la productivité de la main d’œuvre
Donc tout est question d’identifier les contributions totales générées et d’en soustraire les dépenses d’opération pour estimer les profits qui seront réalisés. De là, il est facile de projeter l’impact d’une soumission et de décider en fonction des $ supplémentaires de contributions qui seront générées.
L’objectif des de maximiser les contributions générées par mois afin de rembourser les dépenses d’opération et de créer des profits
Finalement, la perte d’une soumission n’est pas à coût nul, bien au contraire, car elle prive l’organisation des contributions qui participe à « payer » pour les dépenses d’opération; celles-ci étant davantage fixes que proportionnelle aux $ de ventes générés.
À retenir
Perdre une soumission n’est pas à coût nul car elle prive l’organisation de $ de contributions qui remboursent les dépenses d’opération. Dans la mesure où c’est le marché qui détermine le prix de ventes, tout est question de timing. Il est nécessaire de se poser des questions sur les véritables coûts supplémentaires qui sont engendrés par la commande potentielle en termes de main d’œuvre supplémentaire et d’utilisation des équipements importants. La plupart du temps, mis-à-part le matériel, ces coûts supplémentaires sont négligeables. Ce sont les contributions générées qui s’additionnent qui permettre rencontrer les objectifs de profits de l’entreprise. Car finalement, ce ne sont pas les produits qui font les profits, mais l’entreprise!